Le HPI est-il un effet de mode ? Les zèbres sont-ils des moutons ?

Une lectrice m'a dit qu'elle avait l'impression que tout le monde se disait HPI depuis quelque temps, comme si c'était une mode... Et c'est une impression courante sur le sujet : on parle de plus en plus des hauts potentiels intellectuels, des surdoués, des zèbres, des HPI, HPE, surefficients mentaux et compagnie. Est-ce que le haut potentiel est un effet de mode ? Voici mes explications.


HPI, HPE, zèbre, surdoué, haut potentiel : beaucoup de mots pour parler de la même chose

Douance, HPI (pour haut potentiel intellectuel), ainsi que zèbre, HPE, surdoué, surefficient mental, philo-cognition, HQI et QI > 130, c'est tout globalement la même chose.

Il y a quelques légères nuances, et encore d'autres synonymes, donc si ça t'intéresse de tout comprendre, voici un article qui fait le lien et la distinction entre toutes ces appellations.

Par simplicité, j'utiliserai le terme HPI, ou haut potentiel, de manière interchangeable avec les autres, et sans souscrire à la connotation un peu prétentieuse de "haut potentiel".


Les 3 mécanismes qui expliquent le côté "effet de mode"

C'est normal d'avoir l'impression que le HPI est une mode. Normal d'avoir l'impression qu'énormément de gens se déclarent HPI. Je vois trois explications possibles à cela :


Mécanisme n°1 : Le problème de l'égo

Parce que le HPI est confondu avec l'intelligence, et que l'intelligence est valorisée dans notre culture, les gens ont envie de se revendiquer HPI parce que ça valorise l'égo. Il y a donc probablement un certain nombre de personnes qui ne sont pas réellement HPI vu que ça concerne environ 2,3% de la population.

Si ça t'intéresse, je parle ici de notre rapport à l'intelligence dans la culture occidentale française, et de ce que ça implique comme liens avec le HPI.


Mécanisme n°2 : L'illusion de fréquence

Le cerveau a un mécanisme où une fois qu'il découvre quelque chose, il se met à le repérer de partout. Ça s'appelle l'illusion de fréquence, ou phénomène Baader-Meinhof.

Comme quand on achète un nouveau sac à dos, et qu'on a ensuite l'impression que maintenant tout le monde a le même. En fait, il y avait déjà ces sacs à dos, mais on ne les repérait pas. Et c'est peut-être ce qu'il se passe pour toi avec le HPI si tu y vois un effet de mode : depuis que tu as découvert le sujet, tu en entends parler partout parce que ton cerveau repère ces moments, et les pense donc plus fréquents, alors qu'il ne les repérait simplement pas avant.


Mécanisme n°3 : L'effet de la nouveauté

Comme tout phénomène dont la société prend peu à peu conscience, on parle de plus en plus du sujet, avec des articles dans les médias populaires, une série télé et au détour des conversations. Et comme c'est encore nouveau, ça peut sembler être une mode.

Et ça semblera être une mode jusqu'à ce que ça devienne un simple sujet banal, qui fait désormais partie de la normalité : le HPI existe, et c'est tout. Comme ça se passe actuellement avec le TDAH, l'autisme, l'hypersensibilité, la transidentité, l'éco-anxiété, et s'est passé avant ça avec l'homosexualité, l'écologie, le féminisme, etc.

Ces 3 mécanismes peuvent expliquer le côté "effet de mode" que l'on perçoit autour du HPI 😉


La réalité derrière les mots : on n'a rien inventé

Cependant, ayant étudié le sujet depuis 6-7 ans, rencontré des tas de HPI, et étant moi-même concerné par ce fonctionnement, je confirme que ce n'est pas une "mode", mais plutôt la société qui prend conscience d'un fonctionnement qui a toujours été là :

Il y a toujours eu des personnes qui avaient un fonctionnement intellectuel atypique, dans les 2% à droite de la courbe de Gauss du QI. Et ces personnes ont toujours ressenti un décalage avec les autres :


Le phénomène a toujours existé, on ne l'a pas inventé.
Simplement, maintenant, on a des mots pour en parler.
On a des mots pour conscientiser ce qui était déjà là.


Et comme mettre des mots apaise les maux, permet de ne plus se sentir seul·e ou anormal·e, de trouver des pairs qui nous comprennent, et d'identifier des solutions pour mieux vivre son fonctionnement sans avoir l'impression qu'on a intrinsèquement un problème... C'est une bonne chose pour les personnes concernées.

Je dirais même que c'est une bonne chose pour la société, parce que, comme le TDAH, le TSA, l'hypersensibilité, l'introversion/extraversion, le MBTI et tous ces autres modèles de compréhension du fonctionnement humain, ça permet de prendre conscience que les humains ont des fonctionnements psychologiques et neurologiques très variés.


On ne fonctionne pas toutes et tous pareil, et plus on en prend conscience, plus on est capables de s'accepter mutuellement et se comprendre, par-delà nos différences.


Ces "étiquettes", HPI et compagnie, font référence à des phénomènes bien réel, et même si mettre des mots pour nous différencier peut sembler être une manière de nous diviser les uns des autres, c'est en fait une manière de mieux s'écouter, pour mieux s'entendre :


"Diviser", pour mieux rassembler 😉


Maintenant, ce qui peut générer la pensée "Le HPI, c'est un effet de mode", c'est quand celui-ci est utilisé pour justifier de le fait de refuser de prendre en compte les autres "parce que tu comprends, c'est comme ça, je suis HPI" et tomber dans de la victimisation. Dans ce cas-là, l'étiquette ne sert plus à rassembler, mais à diviser. Et elle perd son intérêt :

Ce n'est pas la vision fédératrice et réparatrice du HPI que je défends.

Les étiquettes devraient servir de tremplin pour notre épanouissement et notre entente, jamais de limites qui nous brident ou nous séparent.

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Loïc

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